Ce matin là, comme tant d’autres, Stéphanie se rendait à l’école avec sa copine Justine. Corentin, un garçon de leur classe, vint au devant des deux fillettes, un sourire aux lèvres et un sachet de bonbons à la main.
- Bonjour Stéphanie, tu veux un bonbon ?
- …
- Stéphanie ?
Stéphanie passa son chemin en ignorant superbement le pauvre Corentin. Penaud, il se tourna vers Justine.
- Et toi, tu en veux ?
- Oui, merci Corentin.
Adressant un sourire gêné à Corentin, Justine choisit un bonbon. Elle se hâta ensuite pour rejoindre Stéphanie. En arrivant à sa hauteur, elle fit part de son étonnement.
- Pourquoi t’as fait ça ?
- J’aime pas les binoclards.
- Mais, il est gentil Corentin, et en plus, je crois qu’il t’aime bien.
- Peut-être, mais il est moche avec ses lunettes.
Elles n’eurent pas le temps de poursuivre cette conversation, la maîtresse rassemblant les élèves pour entrer en classe.
La journée finie, Stéphanie rentra chez elle, dévora un solide goûter, puis commença ses devoirs. Il faisait sombre dans sa chambre, en cette fin d’après-midi de printemps. Alors qu’elle apprenait sa poésie, elle vit les lettres commencer à danser sur son cahier. Amusée, elle en parla le soir au dîner avec ses parents.
- Hmm… Il faut que je t’emmène chez un ophtalmologiste, dit sa maman.
- Qu’est-ce que c’est ?
- Un médecin spécialiste des yeux.
Le lendemain matin, en quittant sa maison pour se rendre à l’école, Stéphanie aperçut Corentin au coin la rue. Il semblait attendre quelqu’un. Lorsque Stéphanie arriva à sa hauteur, Corentin lui dit bonjour avec un joli sourire et tendit un petit bouquet de fleurs sauvages attachées ensemble par de longues herbes.
- Tiens Stéphanie, c’est pour toi, je l’ai fit moi-même.
- Non merci, répondit Stéphanie en passant son chemin et laissant Corentin tout triste.
Quelques jours plus tard, en fin d’après-midi, Stéphanie se rendit chez l’ophtalmologiste en compagnie de sa maman. Il lui demanda de lire des lettres sur une grande affiche.
- Z et U
- C’est bien Stéphanie, heureusement que tu arrives à lire les plus grosses lettres. Essaie les plus petites, tout en haut.
- Heu… N, …, A, …, heu…, T ?
- Non Stéphanie, c’était MRTVFU. Je crois que tu vas avoir besoin de lunettes.
Stéphanie eut le sentiment que le sol se dérobait sous ses pieds.
- Oh non, pas de lunettes !
- Si, j’en ai bien peur, répondit le médecin. Mais tu sais, il y en a des très jolies. Je connais même des gens qui voient parfaitement et portent des lunettes pour se donner une allure.
La mine déconfite, Stéphanie sortit du cabinet avec sa maman. Elles se rendirent ensemble chez l’opticien. Pendant un long moment, Stéphanie défila devant les alignements de paires de lunettes en traînant les pieds. Elle ne regardait pas vraiment les montures montrées avec enthousiasme par sa maman. Soudain, une paire de lunettes attira son regard. Elle était toute ronde et d’un rouge propre à éveiller la gourmandise. Stéphanie se laissa tenter. Elle les essaya et fut conquise. L’opticien ayant en stock les verres nécessaires, Stéphanie ressortit de son échoppe avec un sourire ravi et de jolies lunettes.
Le lendemain matin, ses lunettes sur le nez, elle se posta à l’entrée de l’école.
- Bonjour Corentin, tu veux un caramel ?